Où Es-Tu Passée Mélusine ?

Que c’est triste Meyrin sous la pluie le dimanche! 10 heures du matin. Un chat tout mouillé traverse en courant la place des Cinq Continents. Aucun humain, pas de bruit… Sur une des terrasses, il y a cependant une dame. Elle boit un café. Une jolie dame en tailleur gris et noir, les cheveux blonds bien coiffés, mais sa coiffure est terriblement démodée. Son tailleur aussi d’ailleurs. D’où venez-vous jolie Dame ? Quel est le secret qui vous rend si triste et accable vos épaules ? Vos yeux n’ont pas d’expression. Ils fixent le vide sans espoir. Es-ce un chagrin d’amour ? Mais il n’y a pas d’Hommes de votre âge à Meyrin. Vous voyez, le Bistrot est vide. Je doute qu’ils dorment encore ou qu’ils promènent leur chien. Ils doivent boire une bière chez Saint-Pierre!

Si j’étais une Fée, je cliquerais ma baguette magique et alors… tiens, une belle main d’homme se poserait sur la petite table à côté de la vôtre, il y aurait deux petites tasses d’expresso, un bras autour de vos épaules et un petit sourire timide apparaîtrait sur vos lèvres. Mais il n’y a plus de Fées depuis très longtemps. Pourtant, combien de petites filles s’endormaient heureuses dans leur petit lit, serrant leur poupée préférée dans les bras et rêvant à la Fée aux voiles azurés, aux boucles blondes, qui apporterait le bonheur dans leur vie ! Maintenant nous avons tous les petites boîtes magiques (les natels, les iPhones, les iPads etc.) mais que faire d’un Natel pour consoler la Dame Triste ?

Il pleut moins. Des rayons de soleil percent les nuages gris gorgés d’eau et voilà que du fond de la rue François-Besson je vois monter la Dame en Rose, avec son pas énergique. Elle est toute petite, les cheveux blancs et toujours habillée d’un training rose fluo, pliée en deux par l’âge et accrochée à son vieux caddie tout cabossé. « Bonjour, comment ça va? Même le dimanche vous l’emmenez avec vous ? » Et avec un joli accent étranger « Je vais à la Messe et je me cramponne au caddie pour ne pas tomber ». Je ferme mon parapluie. Un groupe de Portugais bruyant a envahi la terrasse du Café. Un de ces messieurs s’est retourné sur sa chaise et parle en riant à la Dame Triste… Elle redresse les épaules et lui répond en souriant.

Mélusine, serais-tu passée par là ce matin ? Le gazon vert brille sous le soleil et dans les flaques d’eau il y a du ciel bleu.